Articles de recherche

When do loyalty programs work? The moderating role of design,
retailer-strategy, and country characteristics

Nick J.F. Bombaij, Marnik G. Dekimpe (2020) – International Journal of Research in Marketing, 37 (1): 175-195 – Synthèse par Naëlle Maignon.

Sujet traité
Le sujet de cet article est l’impact et l’efficacité des programmes de fidélité des détaillants. Plus précisément, ce texte traite de l’efficacité des programmes de fidélité dans les économies émergentes.
Celles-ci représentent, en effet, des marchés de plus en plus essentiels pour les détaillants. Cette recherche ambitionne de leur permettre d’accroître leurs ventes et leurs revenus.
Questions de recherche
Dans quelle mesure le fait de disposer d’un programme de fidélité améliore-t-il les performances du détaillant ? Est-ce que cela dépend des différentes caractéristiques de la conception du programme de fidélité, du détaillant qui l’instaure et/ou du pays dans lequel le programme est utilisé ?

Méthodologie
Les auteurs ont théorisé et testé l’hypothèse que le succès d’un programme de fidélité dépend des caractéristiques de conception de celui-ci, des caractéristiques des détaillants et/ou des caractéristiques du pays dans lequel il est utilisé, en se fondant sur les données de 358 enseignes de vente au détail dans le secteur de l’épicerie dans 27 pays, dont 68% exploitent un programme de fidélité.
L’étude s’est focalisée sur l’impact de plusieurs caractéristiques de la conception d’un programme de fidélité (moment de la récompense, type de récompense, présence d’une structure de récompense progressive et participation à un programme multifournisseurs), du détaillant (positionnement des prix), format du détaillant (supermarché/ hypermarché/discounter) et taille du détaillant et du pays (concentration des détaillants, proportion de concurrents ayant un programme de fidélité, individualisme et orientation à long terme).
Pour mesurer la performance des détaillants — et donc pour quantifier l’impact d’un programme de fidélité —, le critère étudié est la productivité des ventes.
Le choix des enseignes étudiées a porté sur :

  • Les plus grands détaillants en épicerie de 17 pays d’Europe occidentale (Autriche, Belgique, Danemark, Finlande, France, Allemagne, Grèce, Irlande, Italie, Luxembourg, Pays-Bas, Norvège, Portugal, Espagne, Suède, Suisse et Royaume-Uni) et 10 pays de l’Europe de l’Est (Bulgarie, République tchèque, Estonie, Hongrie, Lettonie, Lituanie, Pologne, Roumanie, Slovaquie et Slovénie)
  • Dans chaque pays, les 15 premières enseignes en fonction de leur chiffre d’affaires en 2015, selon Planet Retail
  • Toutes les enseignes ayant au moins 0,05 % de part de marché et 1 million d’euros de chiffre d’affaires.
    Les informations sur les programmes de fidélité ont été recueillies grâce à une recherche approfondie sur le terrain et en utilisant plusieurs sources telles que les sites web des enseignes, les communiqués de presse et les rapports de l’industrie. Sur les 358 enseignes de vente au détail, 245 possédaient un programme de fidélité en 2015 ; ces dernières réunissent des supermarchés, des hypermarchés et des magasins discount.
    Pour mieux tester les hypothèses, sont inclus : la part des ventes de l’enseigne hors alimentation, la part de la marque de distributeur dans le pays (obtenue auprès d’Euromonitor) et le PIB par habitant d’un pays (obtenu auprès de Planet Retail) comme variables de contrôle pour tenir compte de la composition de l’assortiment de
    l’enseigne, de l’environnement global du commerce de détail et de la situation économique globale du pays. Pour cela, deux séries d’instruments ont été utilisées : la première se situe au niveau de l’enseigne, et la seconde au niveau du pays. Tout d’abord, est prise en compte la proportion d’enseignes situées dans un pays voisin et ayant le même format que l’enseigne principale. Puis sont utilisées, à la fois, la qualité et la quantité des fournisseurs locaux du pays grâce auxquelles est tiré l’indice de compétitivité globale.

Principaux résultats
Les principaux résultats de cette étude montrent que les détaillants sont plus susceptibles d’avoir un programme de fidélité lorsqu’une proportion plus élevée de concurrents en possèdent un également.
De plus, les pays où la qualité des fournisseurs locaux est plus élevée sont davantage susceptibles d’adopter des programmes avec des récompenses indirectes, une composante à plusieurs niveaux ou de participer à un programme multifournisseurs. En revanche, l’abondance de fournisseurs locaux rend très peu probable le fait d’adopter un système à plusieurs niveaux ou de participer à un programme multifournisseurs. Par ailleurs, les grands détaillants sont plus susceptibles d’adopter un programme avec calendrier différé contrairement aux discounters.
Concernant la stratégie de prix du détaillant, elle ne semble pas avoir d’effet sur l’efficacité du programme de fidélité. Bien que l’impact d’un programme de fidélité ne diffère pas de manière significative selon qu’il est mis en œuvre dans des hypermarchés et dans des supermarchés, le dit programme est moins performant dans un format discount que dans un format supermarché ou hypermarché.

L’impact des programmes de fidélité dépend fortement des caractéristiques du pays où ils sont mis en œuvre. Ils sont moins efficaces lorsque davantage de détaillants concurrents en adoptent un également.
En ce qui concerne les variables culturelles, il existe un lien fort et significatif entre l’efficacité des programmes de fidélité, l’individualisme et l’orientation à long terme. Les programmes de fidélité sont plus susceptibles de conduire à une meilleure performance des détaillants dans les pays orientés vers plus d’individualisme et plus de long terme ; ce qui s’explique par une plus grande prudence budgétaire de la part de leurs habitants.
Il convient également de noter l’efficacité des programmes de fidélité offrant des récompenses directes et immédiates sur la productivité des ventes des détaillants. Toutefois, cette relation disparaît avec certaines structures de programmes plus complexes, comme l’ajout d’une structure de récompense progressive ou la participation à un programme multifournisseurs. Pour les détaillants en alimentation, la récompense progressive doit être utilisée de manière très minutieuse car des effets négatifs peuvent découler de l’utilisation des programmes de fidélité.
C’est notamment le cas lorsque certains seuils ne sont pas atteints ; cette situation peut faire naître des associations négatives dues à l’échec des objectifs, à la rétrogradation et à l’envie des membres de rang inférieur.
Pour les programmes multifournisseurs, les effets négatifs de la division de la loyauté tendent à l’emporter sur les bénéfices escomptés ou les possibilités de ventes croisées. L’efficacité des programmes de fidélité varie également d’un pays à l’autre : les performances des détaillants sont plus élevées lorsqu’un programme de fidélité est exploité dans des pays où la proportion de programmes de fidélité concurrents est plus faible.

Implications managériales
L’étude donne des clés pour aider les exploitants actuels de programmes de fidélité à évaluer si les caractéristiques de ces derniers sont pleinement conformes aux attentes. De plus, cela permet d’aider les responsables de chaînes internationales de vente au détail à ne choisir que les ” bons ” pays pour exploiter un programme de fidélité car il n’est pas toujours bénéfique de mettre en place une stratégie de programmes de fidélité uniforme. Enfin, cette étude donne aussi la possibilité de savoir si le fait de lancer un programme de fidélité est de nature à améliorer les performances du détaillant (notamment sur des marchés importants) en dehors des pays couverts.

Limites
Tout d’abord, il convient d’examiner l’évolution dans le temps de l’efficacité des différents programmes de fidélité. Pour les détaillants qui sont en train de mettre en place un programme de fidélité ou envisagent de revoir le leur, il serait utile de disposer de plus d’informations sur le court terme, ainsi que d’une évaluation des effets potentiels de l’ajout ou de l’abandon d’un programme de fidélité.
Il serait également intéressant d’étudier si l’adoption d’un système de récompense progressive ou la participation à un programme multifournisseurs devient plus bénéfique dans des chaînes de magasins d’autres secteurs.
Enfin, il serait intéressant que les recherches futures tiennent compte à la fois des avantages et des coûts des différents modèles de programmes de fidélité.

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